Modèle d'analyse

Etape 4 : Le modèle d’analyse

 

Le modèle d’analyse constitue le prolongement naturel de la problématique en articulant sous une forme opérationnelle les repères et les pistes qui seront finalement retenus pour présider au travail d’observation et d’analyse.

 

La construction du modèle d’analyse est conditionnée par la qualité du travail exploratoire. En effet, si les différents textes étudiés ont fait l’objet de lectures approfondies et des synthèses soignées, si elles ont été confrontées avec attention, si les entretiens exploratoires ont été exploités comme il se doit, alors le chercheur dispose normalement de nombreuses notes de travail qui l’aideront considérablement dans l’élaboration du modèle d’analyse. Au fur et à mesure de l’avancement du travail exploratoire, des concepts clés et des hypothèses majeures sortiront progressivement du lot, ainsi que les liens qu’il convient ou qu’il serait intéressant d’établir entre eux. Le modèle d’analyse se prépare en fait tout au long de la phase exploratoire.

Toutefois, qu’est-ce qu’un modèle d’analyse ?

 

Essai de définition du modèle d’analyse

 

Le modèle d’analyse est un ensemble structuré et cohérent composé de concepts et d’hypothèses logiquement articulés les uns aux autres.

Ce qui revient à dire que construire un modèle d’analyse consiste à élaborer un système cohérent de concepts et d’hypothèses opérationnels.

La construction du modèle d’analyse comporte deux opérations :

a-    L’énonciation des hypothèses (construction des hypothèses) ;

b-   La conceptualisation ou la construction des concepts.

 

L’hypothèse

 

Exemples d’hypothèse

1- La déviance est fonction d’une mauvaise intériorisation des normes sociales.

2- La bonne gouvernance conditionne l’épanouissement intellectuel des individus.

3- La consommation des ménages croît avec le revenu.

 

La notion d’hypothèse est liée à la méthode expérimentale. ‘’Il n’est d’observation ou d’expérimentation qui ne repose sur des hypothèses’’[1]. Autrement dit, un travail ne peut être considéré comme véritable recherche s’il ne se structure autour d’une ou plusieurs hypothèses. Quand elles ne sont pas explicites, elles sont implicites ou inconscientes. Ainsi donc, l’hypothèse se trouve au centre de la stratégie de la recherche. Toutefois, qu’est-ce qu’une hypothèse ?

 

 

 

Essai de définition de l’hypothèse

 

‘’Une hypothèse, comme l’usage courant du terme l’indique, n’est pas une certitude : c’est une supposition, une simple vérité possible’’[2].

L’hypothèse est une proposition de réponse aux questions que le chercheur se pose.

L’hypothèse est une réponse provisoire et relativement sommaire aux questions que le chercheur se pose.

L’hypothèse est une réponse anticipée à la question de départ.

L’hypothèse est une proposition provisoire, une présomption (supposition, prétention) qui demande à être vérifiée.

 

L’hypothèse est une idée ou un ensemble d’idées qui sont une interprétation anticipée et rationnelle des résultats possibles de la recherche[3]

‘’L’hypothèse est une conception formulée, fondée sur des probabilités plus ou moins grandes, mais qui ne pourrait être considérée comme un savoir qu’à condition d’être vérifiée[4]. Autrement dit, l’hypothèse est un diagnostic posé par le chercheur selon son entendement qui doit être vérifié sur le terrain.

 

‘’L’hypothèse traduit par définition cet esprit de découverte qui caractérise tout travail scientifique. Le chercheur qui la formule dit en fait : je pense que c’est dans cette direction là qu’il faut chercher, que cette piste sera la plus féconde’’[5]

 

Rôle et fonction de l’hypothèse (les caractéristiques de l’hypothèse)

 

La fonction première de l’hypothèse est de préciser ou de créer les relations qui existent entre les variables étudiées, entre deux termes (qui, selon les cas, peuvent être des concepts ou des phénomènes) et de prévoir à l’aide de ces relations le genre de conclusions qui peuvent être déduites, d’expliquer et prédire le comportement des variables.

L’hypothèse permet au chercheur d’envisager par anticipation les liens qui existent entre deux ou plusieurs phénomènes. C’est elle permet d’établir les implications, de créer des relations causales ou fonctionnelles en recherche.

 

L’hypothèse sert de cadre de travail pour les conclusions. Pas d’hypothèse, pas de conclusions possibles.

L’hypothèse permet des gains de temps pour l’explication du problème et donne la direction de la recherche.

 

L’hypothèse procure à la recherche un fil conducteur particulièrement efficace qui, à partir du moment où elle est formulée, remplace la question de départ de cette fonction même si elle n’est pas entièrement oubliée. La suite du travail consistera, en effet, à tester les hypothèses en les confrontant à des données d’observation. L’hypothèse n’est pas une évidence mais elle guide le travail de recueil de données (l’investigation) et l’analyse de celles-ci. Elle constitue le point d’origine d’un processus visant à confirmer ou à infirmer une assertion générale.

 

Les hypothèses sont des critères de sélection des données. En effet, parmi l’infinité des données qu’un chercheur peut recueillir sur un sujet, l’hypothèse fournit le critère de sélection des données dites pertinentes, à savoir leur utilité pour tester l’hypothèse.

 

Elle ‘’constitue le meilleur moyen de mener une recherche avec ordre et rigueur sans sacrifier l’esprit de découverte et de curiosité propre de tout effort intellectuel digne de ce nom’’[6].

 

L’hypothèse est à l’origine de la théorie. Elle devient donc un instrument de la théorie. En effet, l’hypothèse n’est pas le résumé ou la somme des données touchant à un évènement quelconque mais une affirmation permettant d’aller à la recherche d’explications. Quand elle est confirmée, elle devient un élément de la théorie.

 

Construction des hypothèses

 

La formulation ou la construction d’une hypothèse doit répondre à certaines exigences formelles.

En effet, construire une hypothèse consiste non seulement à imaginer une relation entre deux termes ou deux variables isolées mais également à expliquer la logique des relations qui unissent les concepts évoqués dans la problématique.

Aussi, la construction des hypothèses repose soit sur une procédure inductive (la construction par induction), soit sur un raisonnement de type déductif (la construction par déduction). C’est pourquoi on dit qu’une hypothèse peut être une invention de l’esprit ou une conception perceptuelle d’une réalité.

 

a- La méthode hypothético-inductive

 

Cette méthode produit des hypothèses empiriques ou induites car la construction part de l’observation. Ainsi, à partir des indicateurs, on construit des hypothèses. Autrement dit, on part du travail exploratoire pour construire un système de relations éclairant.

 

Certaines hypothèses ne sont que des relations fondées sur des préjugés ou stéréotypes de la culture ambiante.

Ces hypothèses correspondent au niveau zéro de la construction et, de ce fait, elles conduisent à une compréhension médiocre et déformée de la réalité sociale. De plus sont inutiles et dangereuses. Inutiles parce qu’elles sont généralement démenties dès lors que l’on mène des analyses systématiques et correctement construites. Produits inconscients des préjugés, elles n’apportent pas de nouveaux éléments de compréhension et de connaissance. Dangereuses parce qu’elles peuvent trouver confirmation au niveau des apparences et donner à l’erreur des allures de vérité scientifique. Elles consolident alors des idées simplistes et renforcent artificiellement certains clivages sociaux sur la base d’erreur d’analyse.

 

b- La méthode hypothético-déductive

 

Cette méthode produit des hypothèses déduites ou théoriques car on part d’un postulat ou d’un concept totalisant postulé comme modèle d’interprétation du phénomène étudié. Autrement dit, ces hypothèses sont le produit d’un raisonnement fondé sur un postulat (principe incontestable qui paraît légitime). C’est à partir de la problématique qu’on formule les hypothèses et le modèle d’analyse.

 

Tableau n°3 : Construction des hypothèses

Construction des hypothèses

Méthode hypothético-inductive

Méthode hypothético-déductive

-      La construction par de l’observation

-      L’indicateur est de nature empirique

-      A partir de l’indicateur, on construit de nouveaux concepts, de nouvelles hypothèses et par là, le modèle que l’on soumettra à l’épreuve des faits.

NB : On s’appuie sur l’observation du terrain.

-      La construction part d’un postulat ou concept postulé comme modèle d’interprétation du phénomène étudié.

-      Ce modèle génère, par un travail logique, des hypothèses, des concepts et des indicateurs auxquels il faudra rechercher des correspondances dans le réel.

 

                                         

Les critères d’évaluation d’une hypothèse

 

Comment savoir qu’on a formulé une bonne hypothèse ?

 

Les critères qui servent d’évaluer une hypothèse sont de deux ordres : les critères externes (la forme) et les critères internes (le fond).

 

1- L’hypothèse doit exprimer une relation entre deux ou plusieurs variables ;

 

2- L’hypothèse doit être vérifiable empiriquement c’est-à-dire soumise à l’épreuve de la réalité ;

 

3- L’hypothèse doit être rédigée en de termes simples et sans ambiguïté ;

 

4- Les concepts utilisés par l’hypothèse doivent être précis. L’hypothèse doit s’exprimer avec clarté, à l’aide de concepts qui peuvent faire l’objet d’une définition opératoire par l’intermédiaire de dimensions et d’indicateurs communément admis par tous ;

 

5- Les hypothèses doivent porter sur des phénomènes empiriquement observables ;

 

6- Chaque hypothèse doit être spécifique c’est-à-dire distincte des autres ;

 

7- Les hypothèses doivent être écrites sous forme affirmative ;

 

8- L’hypothèse doit être écrite dans un langage scientifique. Tout chercheur doit être à mesure de comprendre l’hypothèse. Si elle est bien rédigée, un autre chercheur devrait être à mesure de la comprendre et être à même de reconstituer l’expérience.

 

9- On ne peut écrire l’hypothèse qu’une fois terminée la revue de la documentation, sinon on risque de perdre du temps si l’on ne peut vérifier empiriquement l’hypothèse.

 

La conceptualisation ou la construction des concepts

 

La conceptualisation constitue l’une des dimensions principales (ou encore l’une des opérations principales) de la construction du modèle d’analyse.

 

Définition de la conceptualisation

 

La conceptualisation est le fait de construire les concepts.

 

Rôle de la conceptualisation

 

Selon Quivy et Campenhoudt, la conceptualisation est plus qu’une simple définition ou convention terminologique. Elle constitue une construction abstraite qui vise à rendre compte du réel. A cet effet, elle ne tient pas compte de tous les aspects de la réalité concernée, mais seulement ce qui en exprime l’essentiel du point de vue du chercheur. Il s’agit donc d’une construction-sélection. Toutefois, qu’est-ce qu’un concept ?

 

Les concepts

 

Il y a plus d’un siècle, le positivisme logique avait fortement souligné les difficultés résultant de l’ambiguïté des concepts utilisés dans les sciences sociales. Actuellement encore, le vocabulaire de la psychologie, de l’anthropologie, de la sociologie et de leurs domaines connexes est loin d’avoir atteint l’univocité désirable. C’est dire qu’un même concept peut changer de sens suivant la façon dont il est considéré.

 

 

 

 

Définition du concept

 

Le concept est un mot ou groupe de mots exprimant une idée générale sur une chose.

Il peut être défini comme une représentation intellectuelle d’un certain aspect de la réalité provenant de l’observation d’un phénomène ; c’est à la fois une généralisation et une abstraction d’une réalité empirique.

Le concept est une représentation intellectuelle que l’on se fait de la réalité.

Le concept est une construction mentale. C’est un résumé abstrait d’un ou plusieurs phénomènes observables.

 

Rôle du concept

 

Les concepts sont les principaux termes d’une hypothèse. Le concept réunit un certain nombre d’éléments sous un même vocable. Il conduit la réalité observable et trace la route qui mène à l’observation. Le concept rend compte du fait qu’un certain nombre de personnes ou de choses ont suffisamment de traits communs et de différences que d’autres catégories de personnes ou de choses pour qu’il soit possible de les regrouper sous la même appellation.

 

Selon Madeleine Grawitz, ‘’Le concept n’est pas seulement une aide pour percevoir mais une façon de concevoir. Il organise la réalité en retenant les caractères distinctifs, significatifs des phénomènes. Il exerce un premier tri au milieu d’un flot d’impressions qui assaillent le chercheur’’.

Madeleine Grawitz ajoute que le concept est un outil qui non seulement est un point de départ, mais également un moyen de désigner par abstraction, d’imaginer ce qui n’est pas perceptible au chercheur[7]

 

La recherche sociale impose au chercheur, avant tout contact avec le terrain, de prendre soin de construire ses concepts en rapport avec le phénomène social à étudier.

 

Pourquoi faut-il construire un concept ?

 

Si un concept est une idée abstraite, un symbole qui n’est pas directement observable ou mesurable car complexe (ce qui veut dire que le concept complexe est moins accessible à l’observation directe), alors le chercheur doit inventer ou créer des moyens qui lui permettent d’adapter le concept à des fins d’investigation scientifique. Pour ce faire, il ajoute des dimensions et des indicateurs afin que le concept devienne opératoire. C’est cela construire un concept.

En d’autres termes, construire un concept consiste d’abord à déterminer les dimensions qui le constituent et par lesquelles il rend compte de la réalité. Construire un concept, c’est ensuite en préciser les indicateurs grâce auxquels les dimensions pourront être mesurées.

 

Ainsi donc, donc la conceptualisation ou la construction des concepts se fait en plusieurs opérations :

a-    Déterminer les dimensions ;

b-   Déterminer les composantes ;

c-    Préciser les indicateurs.

 

Nature des concepts

 

Il y a deux types de concepts :

 

1-   les concepts simples

 

Exemple

Concept : Vieillesse

Dimension : Chronologique

Indicateurs : âge (la date de naissance), les cheveux blancs et rares, le mauvais état de la denture, la peau ridée.

 

2-   Les concepts complexes

 

Ils nous obligent à décomposer les concepts en dimensions et chaque dimension en indicateurs.

 

Tableau n°4 : Décomposition d’un concept

 

 

 

 

 

Concept

 

 

 

Dimension 1

 

Composante 11

Indicateur 111

Indicateur 112

Indicateur 113

Composante 12

Indicateur 121

Composante 13

Indicateur 131

Indicateur 132

Dimension 2

Indicateur 211

 

Dimension 3

Indicateur 311

Indicateur 312

Indicateur 313

 

Les dimensions

 

Définition d’une dimension

 

Les dimensions sont les paliers intermédiaires entre le concept et les indicateurs. Ce sont les différentes manifestations d’un concept. Les dimensions sont les aspects de la réalité que couvre un concept. Elles font référence à différents niveaux de la réalité. Tout ce qui n’est pas observable, ni directement mesurable est de l’ordre des dimensions.

 

 

 

 

 

Rôle et fonction des dimensions

 

Les dimensions concrétisent le concept ou le précisent à partir de sa définition. Elles précisent les aspects ou les composantes du concept. Les dimensions assurent le passage du versant abstrait au versant concret de l’analyse conceptuelle.

 

Les indicateurs

 

Définition de l’indicateur

 

Les indicateurs sont les traits, les signes tangibles et observables du concept ou de la dimension. Ce sont les éléments observables de la réalité. Ils sont les manifestations objectivement repérables et mesurables des dimensions du concept. Les indicateurs représentent l’aspect visible ou manifeste du concept ou de la dimension. En fait, ce sont des observations empiriques ou des données.

 

Rôle et fonction de l’indicateur

 

Bien souvent, en sciences sociales, les concepts et leurs dimensions ne sont pas exprimés en des termes directement observables. Or, dans le travail de recherche, la construction n’est pas une pure spéculation. Son objectif est de nous conduire au réel et de nous y confronter : c’est cela le rôle des indicateurs.

Ils rendent le concept opérationnel. Ils permettent d’observer indirectement un concept sous ses manifestations concrètes. Les indicateurs permettent d’atteindre l’aspect concret de ce que l’on cherche.

Les indicateurs permettent de vérifier une hypothèse. Associés à leurs indicateurs éventuels, les deux concepts d’une hypothèse sont présentés de telle sorte que l’on perçoit facilement le type d’information qu’il faudra récolter pour la tester.

 

Remarques générales

 

Un seul indicateur peut être trompeur, mais plusieurs indicateurs assurent la validation de la dimension. Autrement dit, c’est la pluralité des indicateurs qui assure une évaluation judicieuse de la dimension ou du concept auxquels ils se rapportent.

 

Pour trouver les indicateurs de chaque dimension envisagée, il faut se poser à chaque fois la question suivante : Par quels signes observables dans la réalité vais-je retracer cette dimension ?

Pour trouver les indicateurs, on fait appel à ses connaissances, à son expérience et à son intuition.

 

Concept : Vieillesse

Indicateurs : âge (la date de naissance), les cheveux blancs et rares, le mauvais état de la denture, la peau ridée.

 

 

 

Les niveaux de conceptualisation (les méthodes ou les différentes façons de construire un concept)

 

Il y a deux façons de construire les concepts ou deux niveaux de conceptualisation :

1-   L’un est dit inductif et produit des concepts opératoires isolés ;

2-   L’autre est dit déductif et produit des concepts systémiques.

 

Ces deux types de concept se distinguent non seulement par la méthode de construction mais aussi par la qualité de rupture avec les préjugés.

 

Le concept opératoire isolé

 

a- La construction

 

Un concept opératoire isolé est un concept construit empiriquement à partir d’observations directes et d’informations rassemblées par d’autres. C’est à travers les lectures et les entretiens exploratoires que l’on peut recueillir les éléments nécessaires à cette construction. Autrement dit, pour construire un concept opératoire isolé, on part des indicateurs que le réel nous présente, on sélectionne, on regroupe et on combine.

 

b- Rupture

 

Le concept opératoire isolé est doublement vulnérable par le fait qu’il est construit empiriquement.

D’abord parce que dans l’induction, on part de ce que l’on perçoit avec l’œil et l’oreille de Monsieur-tout-monde. On construit à partir des observations partielles et d’informations biaisées qui se présentent à nous.

De plus, même lorsqu’elle est fondée sur la comparaison, la confrontation ou l’analyse critique, la construction est sujette aux influences de préjugés et schémas mentaux préconçus.

 

Le concept systémique

 

Pour construire un concept systémique, on commence à raisonner à partir d’un paradigme développé par les grands auteurs et dont l’efficacité a pu être testé empiriquement ; On situe le concept par rapport à d’autres concepts, ensuite, par déduction en chaîne, on dégage les dimensions, les composantes et les indicateurs.

 

Le concept systémique n’est pas induit par l’expérience ; il est construit par raisonnement abstrait : déduction, analogie, opposition, implication… même s’il s’inspire forcément des objets réels et des connaissances acquises antérieurement sur ces objets. Dans la plupart des cas, ce travail abstrait s’articule à l’un ou l’autre cadre de pensée plus général que l’on appelle paradigme.

Exemple : La construction du concept ‘’acteur social’’ peut s’inscrire dans le cadre du paradigme de la sociologie de l’action.

Dans le cas des concepts systémiques, l’indicateur est une construction de l’esprit, une conséquence logique d’un raisonnement antérieur. Il ne représente plus un état des choses mais désigne une catégorie mentale à la quelle pourrait correspondre un fait, un signe qui est à découvrir et dont l’absence ou la présence prendra une signification.

 

Conclusion

 

Que l’on procède par méthode inductive ou déductive, la construction des concepts conduit toujours à opérer une sélection sur le réel. Le problème crucial de toute construction conceptuelle est celui de la qualité de la sélection.

Ainsi, pour le concept systémique, la sélection est le produit d’une logique déductive et abstraite, ce qui est considéré comme la manière la plus apte à rompre avec les préjugés.

Pour le concept opératoire isolé, la sélection repose aussi sur une construction, mais l’empirisme du procédé inductif le rend vulnérable aux préjugés.

Le concept opératoire isolé se situe donc à mi-chemin entre le concept systémique et les prénotions qui, loin de constituer des représentations mentales construites, ne sont que le produit inconscient des préjugés.

 

La position intermédiaire des concepts opératoires isolés ne doit cependant pas nous conduire à les mépriser. Dans la recherche scientifique, on n’atteint pas d’emblée le niveau supérieur. C’est même plutôt rare. Le fait de passer du niveau des prénotions à celui des concepts opératoires isolés constitue déjà un progrès.

Au lieu de présenter les concepts opératoires isolés et les concepts systémiques selon un schéma linéaire d’un rapport hiérarchique, il serait sans doute plus pertinent de les situer dans un rapport dialectique par lequel ils s’éclairent et se défient mutuellement pour faire progresser la connaissance scientifique. Car finalement ce qui fait la valeur d’un concept c’est sa capacité heuristique c’est-à-dire ce qu’il nous aide à comprendre et à découvrir, c’est le progrès de la science.

 



[1] R. Quivy et Luc Van Campenhoudt. Manuel de recherche en sciences sociales. Paris, Dunod, p.134

[2] J. L. Loubet Del Bayle. Initiation aux  méthodes des sciences sociales. Paris, L’Harmattan, 2000, p.178

[3] Claude Bernard. Introduction à la médecine expérimentale. Paris, 2d. Garnier Flamarion, 1865, p.201

[4] Mesmin Noël Soumaho. Eléments de méthodologie pour une lecture critique. Paris, L’Harmattan, 2003, p.13

[5] R. Quivy et Luc Van Campenhoudt. Manuel de recherche en sciences sociales. Paris, Dunod, p.118

[6] R. Quivy et Luc Van Campenhoudt. Manuel de recherche en sciences sociales. Paris, Dunod, p.117

[7] Madeleine Grawitz. Les méthodes en sciences sociales. Paris, Dalloz, 9e édition, p.329

 

Lire aussi...

L'observation